Jules Valles. Souvenirs d'un Ă©tudiant pauvre
« Je fis connaissance, pendant ces visites Ă la Sorbonne, de quelques individus qui y venaient rĂ©guliĂšrement Ă chaque session, et qui, Ă chaque session, Ă©taient refusĂ©s, mais sâen allaient joyeux, contents, se fĂ©licitant, se congratulant, se tapant sur le ventre, donnant en un mot les signes de la plus vive satisfaction, et allant se griser comme des Polonais avec des femmes de gorge pesante mais de mĆurs lĂ©gĂšres ! Il y en avait dâassez jeunes â la plupart Ă©taient vieux.
Lâun dâeux, Ă qui je parlais de mes deux retoquages, me dit :
â Moi, jâai Ă©tĂ© refusĂ© sept fois, et je compte bien lâĂȘtre sept fois encore, et mĂȘme plus, nâest-ce pas, Baron ?
CâĂ©tait un soir de noce dans un cafĂ© oĂč jâallais depuis quelque temps, pour les entendre parler bachot, et parce quâils mâintriguaient, ces blackboulĂ©s si gaiement rĂ©signĂ©s, qui Ă©taient toujours suivis de jeunes gens dont la bourse se vidait sur la table, tout le monde se serrant les mains et trinquant : âAux vieux melons de la Sorbonne !â »
Du 8 janvier au 5 mars 1884, malade et de retour dâexil, Jules VallĂšs publie ses Souvenirs dans le quotidien Le Cri du peuple. Son rĂ©cit complĂšte Le Bachelier, qui parut en 1881, et anticipe LâInsurgĂ© dĂ©finitif, qui paraĂźtra aprĂšs sa mort. Le grand Ă©crivain et journaliste, le chantre de la Commune de Paris, y relate lâĂ©ducation politique dâune gĂ©nĂ©ration, celle qui eut vingt ans entre 1848 et 1851.
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